Quelles sont les différences entre Le Vaisseau fantôme de Wagner et celui de Dietsch ?
L’opéra de Dietsch est écrit pour des voix lyriques de l’Opéra de Paris, avec un fond de déclamation mais aussi de virtuosité, une certaine délicatesse, une certaine brume un peu française. L’ouvrage de Wagner est beaucoup plus dans la déclamation, la force et la puissance vocale. Les voix sont différentes, même si l’héroïne reste toujours une soprano et le Hollandais est un baryton, mais il est beaucoup plus grave chez Wagner. Le ténor, qui est le fiancé frustré de l’héroïne, est beaucoup plus lyrique chez Dietsch. Chez Wagner, le discours orchestral est d’une force incroyable. On a vraiment l’impression d’être dans une tempête en mer, avec les sonneries de cuivre. On ressent l’écume d’un bout à l’autre dans la musique. Tandis que chez Dietsch, il y a un mystère, une évocation de la mer, mais c’est plus narratif que sonore. Wagner a aussi cherché à mettre en musique des chansons de marin, chantées par le choeur qui figure l’équipage du bateau, le peuple qui se trouve sur le port et un magnifique refrain interprété par le timonier. Wagner fait également des références à Bellini, qu’il admirait énormément. Mais les deux figures principales (Senta et le Hollandais chez Wagner, Minna et Troïl chez Dietsch) sont traitées de manière très différentes.
Entretien réalisé par Caroline Falque-Vert, Les Affiches, 10 mai 2013
( en photo : Evgeny Nikitin, Le Hollandais dans Le Vaisseau fantôme de Wagner / crédit : Bob Gruen)